La parole aux aides ménagères : "Je ne veux pas me plaindre mais mon travail n'est pas facile. Mon corps est comme une voiture qui vieillit et qui commence à casser de partout."

On lit dans la presse que, partout en Belgique, le secteur des aides ménagers manque de bras. Rien d’étonnant, quand on voit les conditions salariales en-dessous de tout et la pénibilité du travail. Les travailleuses de ce secteur (la profession compte 98% de femmes sur environ 150.000 travailleurs) finissent cassées par les années de labeur et la majorité d’entre elles ne parviennent pas à bosser jusqu’à la pension. Nombreuses sont les mères de famille qui doivent en plus tenir à bout de bras leur propre ménage et qui, lorsqu’elles sont seules, doivent faire des petits boulots sur le côté pour survivre financièrement. Souvenez-nous de ce témoignage que nous avions publié il y a quelques temps :

Dimanche passé, c’était mon anniversaire, j’ai eu 57 ans. Durant mes jeunes années, j’ai travaillé dans l’Horeca en Espagne puis en Belgique. Puis j’ai travaillé dans les titres-services. Aujourd’hui je me sens épuisée. Je travaille beaucoup et je dois m’occuper seule de ma fille de 18 ans qui termine l’école. J’ai perdu mon mari, le père de ma fille, à cause du Covid.

Je ne veux pas me plaindre mais mon travail n’est pas facile. Mon corps est comme une voiture qui vieillit et qui commence à casser de partout. Depuis quelques mois par exemple j’ai un problème au poignet qui au bout de quelques heures de travail se met à gonfler et à faire mal. Du coup je suis obligée de prendre mes potions magiques pour faire aller. Mais bon je me demande comment j’irai dans quelques années. Quand je rentre chez moi le soir après fait le ménage 8 heures, je peux vous dire que je veux juste aller me coucher. Mais je dois préparer à manger, m’occuper de ma fille, etc.

Aujourd’hui je gagne environ 1400 euros par mois à temps plein. C’est pas grand-chose, surtout avec les prix fous qui montent. Je suis obligée de faire un petit boulot sur le côté (je prépare des repas). On se prive de plus en plus et on garde la tête hors de l’eau grâce à des astuces pour peu consommer. En tout cas je peux vous dire que je n’allumerai pas mon chauffage de l’hiver haha !

Un truc que je fais automatiquement maintenant, c’est me mettre en mode « pilote automatique ». Le réveil sonne, je me lève, même si je suis claquée, même si j’ai froid, même si j’ai pas envie. Je mange, je fais à manger à ma fille, puis je prends le bus pour aller au travail comme à l’usine… Le mode « pilote automatique » me permet de jamais flancher. Au travail et dans mon ménage, je suis obligée d’être assez ordonnée, parfois au millimètre, sinon ça part en cacahouète.

https://www.ruptureetrenouveau.be/2022/10/11/temoignage-dune-ouvriere-des-titres-services/

Aujourd’hui, avec l’explosion des prix du carburant, la situation se complique encore pour les aides ménagères qui se déplacent souvent chez leurs clients avec leur propre véhicule, alors que les kilomètres parcourus sont insuffisamment remboursés (malgré la hausse récente !).

Ces courageuses ouvrières de l’ombre subissent trop souvent leur dure exploitation en silence, livrées à elles-mêmes. Ne les oublions pas ; leur place est aux côtés de leurs frères ouvriers, dans la lutte pour une vie meilleure.

Rejoignez-nous: https://www.ruptureetrenouveau.be/nous-rejoindre/