1. En France, ce 5 décembre a débuté un mouvement massif et national de grève pour protester, notamment, contre la réforme des retraites qui sera présentée au parlement français au début de l’année 2020. La réforme devait faire son apparition en 2018 mais a été repoussée à la suite du mouvement des Gilets jaunes. Pour cette première journée de grève, le nombre de manifestants recensés dans toute la France se situe entre 700.000 (chiffres du gouvernement) et plus d’un million et demi selon la CGT. C’est historique. Des tensions et affrontements avec la police ont eu lieu. Le mouvement de grève devrait se poursuivre dans les jours à venir.

2. Les membres du gouvernement ne manquent pas de rappeler que les contours exacts de la fameuse réforme restent inconnus. C’est parfaitement exact… mais peu importe car ce qui compte « c’est la vision, c’est le projet » ; comme l’indique le radical marxiste notoire François Fillon, le système de retraite par points « permet de baisser chaque année le montant, la valeur, des points et donc de diminuer le niveau des pensions ».

3. Ce mouvement de grève dépasse la seule question de la réforme des retraites. En effet, les coups assénés par le gouvernement de Macron ont été continus depuis son investiture : réforme au niveau des allocations de chômage (instauration d’une dégressivité), privatisations multiples, réformes fiscales défavorables aux classes populaires, réformes, en droit du travail, défavorables aux travailleurs… Bien entendu, la politique du gouvernement de Macron s’inscrit dans la lignée des politiques menées par les gouvernements l’ayant précédé.

Les politiques des gouvernements successifs, l’exploitation de plus en plus féroce des travailleurs par le patronat, la concurrence de plus en plus rude instaurée entre les travailleurs, etc., ont mené à une situation sociale explosive dont la première déflagration a été, dès le 17 novembre 2018, le mouvement des Gilets jaunes. Dans ce mouvement, les masses – dont la classe travailleuse a fourni le gros des rangs et a constitué la force motrice – ont débordé du canal creusé par les syndicats et partis du système pour prendre leur destin en main et lutter, de manière spontanée mais résolue et puissante, signant ainsi une nouvelle étape dans le développement de la lutte des travailleurs et des masses en général. À cette occasion, l’État a brutalement rappelé à ceux qui en doutaient et révélé à ceux qui l’ignoraient sa nature et quels intérêts il sert.

Les bureaucraties syndicales, coupées de leur base, n’ont évidemment pas pu ignorer ce mouvement et ont été contraintes de se positionner. Elles se sont contorsionnées jusqu’au déchirement pour, d’une part, en bonnes conciliatrices de classes et canalisatrices de la colère des masses, modérer et contenir au maximum le mouvement et, d’autre part, faire mine d’être dans le camp des Gilets jaunes, sous peine de risquer d’être mises au pilori par leur base syndicale.

Un an après le surgissement du mouvement des Gilets jaunes, les travailleurs, les bases syndicales, en redemandent. Face à la colère populaire, les syndicats la jouent « dur »… En effet, quelle est la grande frayeur des bureaucraties syndicales ? Que le mouvement leur échappe et s’emballe d’une manière incontrôlable. C’est d’ailleurs un point commun qu’elles ont avec le gouvernement…

4. Autorisons-nous un petit rappel théorique.

Notre système de production est basé sur la propriété privée des capitalistes sur les moyens de production (machines, outils, usines…). Les travailleurs ne possèdent rien d’autre que leur force de travail qu’ils doivent vendre aux capitalistes. Ces derniers poursuivent le but de tirer, en vendant des produits fabriqués, plus d’argent qu’ils n’en ont dépensé pour leur production. Et comment ce miracle s’accomplit-il ? C’est Marx qui le premier l’a démontré : ce miracle s’accomplit par l’exploitation des travailleurs ; ceux-ci vendent aux capitalistes leur force de travail… mais produisent de la valeur en plus de celle de leur force de travail. Cet excédent s’appelle la plus-value et les capitalistes s’en emparent gratuitement. Autrement exprimé, le salaire des travailleurs (qui est l’expression monétaire de la valeur de leur force de travail) est inférieur à la valeur qu’ils produisent.

Ainsi, les intérêts des travailleurs et des capitalistes sont diamétralement opposés et, on l’aura compris, la grève est une arme « prolétarienne » par excellence, incontournable dans la lutte contre les capitalistes puisqu’elle attaque « là où c’est douloureux ».

Très logiquement, il est de l’intérêt des capitalistes que les travailleurs soient isolés, « atomisés », afin que le rapport de force leur soit avantageux. Au point de vue économique, la concurrence entre les travailleurs va en ce sens. Elle est interne mais dépasse en outre les frontières nationales (que l’on pense à l’ampleur du dumping social) en sorte que l’on monte les travailleurs nationaux les uns contre les autres et les travailleurs nationaux contre les travailleurs étrangers. Par ailleurs, l’État, appareil des capitalistes, met tout en œuvre et fait preuve de la plus grande ingéniosité pour diviser les travailleurs le plus possible : usagers contre grévistes, violents contre non-violents, régimes spéciaux contre travailleurs ordinaires, privé contre public, etc., etc.

5. Les révolutionnaires conscients et conséquents (c’est-à-dire pas qu’en paroles) doivent, par un colossal travail de propagande, d’agitation, d’éveil, d’organisation, forger au sein des travailleurs une conscience s’élevant à la compréhension de leurs intérêts vitaux en tant que classe, les mener sur le terrain de la lutte révolutionnaire. Cela doit passer par la constitution d’un solide parti communiste de masses.

6. Rupture & Renouveau souhaite témoigner tout son soutien aux travailleurs français dans leur lutte. Qu’ils ne se laissent pas enserrer dans le canal syndical et qu’ils avancent unis, résolument et fermement. Ce à quoi à ils répondent n’est pas propre à la France. Les travailleurs belges doivent et vont inévitablement, tôt ou tard, se lever également. Aux révolutionnaires de faire leur travail avec régularité et ténacité.

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